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Démarche

 

 

   " En choisissant de travailler avec des matériaux mous, je cherche à rendre visible et effective la force de gravité au travail dans la forme. Je ne vais pas avec violence contre la tendance de la matière à s’informer, je tente plutôt de concilier le poids et le fluide en acceptant que la forme d’existence de l’œuvre en soit affectée totalement ou en partie.              

La céramique, grâce à sa capacité à passer de l’état de mollesse à la rigidité, imprime en elle les forces de la gravité et les retient. Au fur et à mesure, de ma pratique, une sorte de compromis s’est installé entre mon geste et la matière. J’ai appris à résonner avec elle et non contre elle : travailler avec ces intentionnalités de la matière et dans une certaine mesure, les laisser aller.

Même si j’envisage au préalable une structure, une âme, qui me permettra de donner une forme définitive à la pâte céramique une fois sèche, je lui laisse la possibilité d’apprécier sa tendance à la chute, de revendiquer son envie irrépressible d’horizontalité. L’opération que je lui fais subir est sans conteste risquée : en témoignent les fissures qui fendent mes pièces et les rendent fragiles. En travaillant de cette manière,  je flirte avec un état limite de la forme.              Le papier est intervenu dans ma pratique dans une perspective de prolongement de gestes et des procédures engagés avec la céramique. Mon utilisation du tissu s’inscrit dans la même perspective.

        

   L’expression « comme laissées à elles-mêmes » me semble assez significative d’une forme d’autonomie que l’on peut prêter à mes pièces. Dans la mesure où les procédures que j’emploie laissent une part d’automorphisme à l’œuvre, mes pièces semblent contenir en elles leur propre raison formelle. Comme si peser, c’était déjà être là et non être posé là, affirmant la pesanteur comme symptôme de présence à l’espace."

 

Elisabeth Piot 

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